M – 8 septembre 2015



Lorsque l’on retombe amoureux, c’est-à-dire dans les premiers temps où l’on s’obsède pour quelqu’un qu’on connaît somme toute peu, mais qui semble pouvoir remplir le creux qui s’était ouvert et élargi en nous, imperceptiblement, depuis qu’on était seul, dans ce moment on a toujours l’impression que cela fait une éternité que l’on n’a pas été amoureux. C’est-à-dire, que jamais on n’a aimé « comme ça ». Pour aimer, peut-être faut-il toujours croire que c’est la première fois que l’on tombe véritablement amoureux. Mais de ça, il est chaque année plus difficile de me convaincre puisque l’expérience, la mémoire intellectuelle, me rappelle, en haussant les épaules, qu’à chaque fois je m’étais dit exactement ça, je m’étais dit « C’est elle ! Je n’ai jamais aimé personne comme ça ». L'expérience me souffle ça, mais la sensibilité me dit que non, bien sûr que non, avant ça n'était pas ainsi, avant ton cœur ne battait pas comme ça, ton imagination ne se roulait pas dans tous les interstices de la journée en criant son nom.

J'ai tout simplement, comme tout le monde, question de survie, oublié comment c’était de tomber amoureux de la précédente, et de la précédente avant elle, etc. C'est très douloureux, au milieu des joies premières du sentiment amoureux, de savoir pertinemment que cette femme aussi, je l'oublierai car notre histoire n'aura pas lieu, je l'oublierai ainsi que ces moments de survol du monde qu’elle me donnait sans s'en douter, et qui sont identiques peut-être, à ceux qui passèrent ainsi qu’à ceux qui passeront.

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