14 août 2015 - Crédit Mut’


Peu de choses me font penser véritablement à A. Véritablement penser, c’est-à-dire avec un serrement de cœur, avec l’idée d’un amour perdu, d’une femme que je peux revoir mais certainement jamais retrouver telle que je l’ai connue – amoureuse, aimée, jeune.


 Quand je me souviens de voyages, d’anecdotes et de moments vécus avec elle, pendant ces dix ans, c’est décollé de sa personne, c’est mêlé à la mienne, de sorte que je me souviens surtout de notre passé mais jamais du sien propre. Je pense à nous, je ne sais comment penser à elle.
Seule peut-être la vision sur mon chemin d'une succursale du Crédit Mutuel me fait penser intensément et exclusivement à Agathe. Elle y était cliente, pas moi. Elle disait « Crédit Mut’ », je vais au Crédit Mut, je reviens du Crédit Mut, c’est une lettre du Crédit Mut’, et cette sonorité, ces 3 syllabes dont la dernière claquait comme une surprise et comme un meuglement, n’étaient qu’à elle et ne venaient que d’elle. A chaque fois que je vois cette banque, comme je n’en connais aucun autre client qu’Agathe, c’est elle que je retrouve toute entière : mienne et inchangée, bouleversante et quotidienne, une Agathe qui n’existe plus ailleurs que dans la mémoire de mon cœur, dans un tiroir fermé à double tour par le changement des sentiments et de ma personne, par une une serrure que seuls, peut-être, les agences Crédit Mutuel ouvrent aussi facilement.

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