Ça ressort. Quoi ? L’écriture. Ressort, c’est
bien ça : sortir, mais aussi rebondir. Ça parle, ça se précise, les mots
s’affinent s’allongent les idées prennent de la netteté de la bizarrerie et
les voilà qui croissent et se multiplient. Je la sens depuis des mois bouillir, l’envie
non plus de raconter mais d’écrire, d’écrire, d’écrire. De rassembler des mots,
d’en faire des tas compacts, tas de sable qu’on shoote du pied ou qu’on cisèle en châteaux.
Ça monte, ça ressort, poussée de bourgeons : de
l’écriture, de la musique, des larmes, du rire. Le Brésil, Kim, Pauline :
pages douloureuses ou joyeuses, tournées et oubliées. Chaque (illisible) est une renaissance. Quelque
chose s’ouvre enfin en moi et entre mes mains va se refermer, je le pressens,
en création. Que s’est-il passé ? Je tente de rassembler. Il y a eu ce
moment formidable où, rouvrant la Boîte à
idées, j’ai vu qu’il y avait en fait tant
et tant d’idées, d’envies, non pas remisées comme je le croyais, mais
attendant le souffle que je me sens rassembler en moi. Certaines de ces idées
étaient belles et bonnes, fraîches malgré le nombre des années à attendre là,
et toutes mes ressemblaient énormément. Le démon qui parfois me dit que je n’ai
pas d’inspiration, pas d’imagination, peut bien aller niquer sa mère.
Reste à amener les projets à leur terme : je dois
me prouver, avec XXX, avec ce projet
de roman, que je peux traîner ces idées jusqu’à leur fin. C'est la seule chose qui me
différencierait d’un enfant imaginatif ou d’un fainéant plein d’idées. Je crois que
j’avais besoin d’une réalisation : cela a été l’acceptation de l’épisode
de Grabouillon par la production. En
soi ce n’est rien : symboliquement c’est beaucoup. (....) Oui, cela me
rappelle qu’une vie est possible et viable, qui consiste à raconter des
histoires. Une vie est là, dans laquelle j’écrirais des scripts ou quelque chose de ce genre, une vie
calme et douce et solitaire et terrible où manquerait la frénésie des
tournages, du collectif, des ordres donnés et des plans de guerre, mais ce
manque est-il (pour l’instant) si grave ? Ma condition d’homme toujours
fatigué, d’homme trop sociable aussi, s'en contente pour l’instant très bien. Il y a une autre existence qui s’en rapproche et qui soudain paraît possible,
souhaitable, rêvable : celle de l’écriture littéraire. Me manque encore la
discipline de l’écrivain, la hargne d’écrire dès le saut du lit et de se frotter la pensée aux pages toute la journée durant. Je ne peux,
comme le narrateur dans La Recherche du Temps Perdu,
me dire que, sans savoir par quelle magie, cela viendra. Je dois y prendre part, maintenant. En attendant, ça ressort.
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